TNI
Mathilde Delahaye

« À Aurillac, en juin 2021, je travaillais une adaptation du roman Après le monde, d’Antoinette Rychner. Après le monde est un roman dystopique construit dans l’alternance de deux formes narratives. D’une part il y a le récit des errances d’un petit groupe de personnes dans l’est de la France après qu’un effondrement a mis un terme au monde tel que nous le connaissons, des rencontres qu’iels font et des paysages qu’iels traversent, bouleversés et réinventés: une dystopie assez crédible dans l’Europe riche qui se croyait à l’abri des catastrophes écologiques et économiques. Et d’autre part, tressée avec le récit, on lit la retranscription de Notre épopée, un chant épique à vocation mémorielle qui raconte au féminin pluriel l’effondrement qui eut lieu en 2023 et la reconfiguration du monde les années qui suivirent. Repenser nos rapports au vivant, conjugué au futur inquiétant, non pas pour provoquer un frisson gratuit, mais pour donner à voir des façons de vivre décroissantes par contrainte et envisager des paysages – extension de nos êtres – abîmés mais résilients : Notre épopée est une invitation à la pensée alternative, à la recréation d’un monde, l’invention de nouvelles fictions. Ce chant, peu à peu étoffé et mis en musique dans le roman, est transmis de village en village, devient le ferment fragile d’une nouvelle identité, une nouvelle histoire, écrite au féminin pluriel. Dans un futur proche dépourvu des technologies que nous connaissons, renouer avec la tradition millénaire du mythe transmis de bouche à oreille, des aèdes itinérantes, et poser la question du récit collectif, de l’Histoire (qui l’écrit, qui la raconte, comment se diffuse-t-elle?) me sont apparues comme des questions directement adressées au théâtre. »

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Extrait d'une note d'intention de Mathilde Delahaye